La jeunesse sacrifiée du « National-socialisme »

Tous les régimes totalitaires du vingtième siècle -de l’Italie à l’Union Soviétique en passant par l’Allemagne- comprennent très tôt l’importance de contrôler la jeunesse ; un slogan de la propagande du troisième Reich dira même : « L’avenir appartient à celui qui contrôle la jeunesse ». C’est ainsi que fleurit partout en Europe pendant la période de l’Entre-deux- guerres, des organismes ayant pour but d’encadrer et de fanatiser la jeunesse afin d’en faire des bons et de dociles soldats…

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Jeune de la Hitlherjugend

La folle entreprise de « Régénération spirituelle » de la jeunesse allemande

L’idée d’une organisation de la jeunesse naît en 1926 lors de l’annuel congrès du parti Nazi à Weimar. L’objectif est très simple : former la jeunesse allemande de souche aryenne à devenir de futurs loyaux soldats ou cadres du parti dans le grand Reich qu’Hitler rêve alors de créer. C’est ainsi que naissent les « Hitlerjugend » (les Jeunesses hitlériennes) qui vont de 1926 à 1945 former la chair à canon  et qui vont donner leur sang jusqu’aux dernières secondes de l’existence de l’Allemagne nazie. Mais, pendant ces dix-neuf ans, les « Jeunesses Hitlériennes » vont revêtir différents visages. Tout d’abord, entre 1926 et 1933, lorsque le parti n’est pas au pouvoir, elles s’inspirent surtout des groupuscules scouts chrétiens. La « Hitlerjugend » a alors surtout comme but de former les jeunes garçons âgés entre six et dix ans à la vie en communauté, au sport et à la confrontation avec la nature. Sa pédagogie vise toujours à mettre les jeunes garçons en compétition les uns avec les autres, le tout dans une ambiance antisémite et nationaliste.

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Uniforme jeunesse Hitlerienne

En 1933, Hitler gagne les élections allemandes et devient donc chancelier. Il compte bien propulser son association d’encadrement de la jeunesse au niveau national. Le service devient donc obligatoire pour les jeunes garçons entre huit et quatorze ans et facultatif pour les jeunes filles. L’éducation des jeunes allemands se fait donc dans la brutalité : on leur apprend le maniement des armes et les valeurs du nationale socialisme décrit par Hitler dans « Mein Kampf ». Bien que les enseignements physiques priment sur les enseignements intellectuels ou moraux, quelques cours théoriques y sont donnés comme des cours d’histoire nazifiés ou de biologie visant à prouver la supériorité de la race aryenne.

Les Napolas, l’élite de la jeunesse allemande

En parallèle des Jeunesses Hitlériennes sont créées en 1933, les Napolas (Nationalpolitische Lehranstalt). Ce sont des écoles où l’on forme de jeunes garçons à devenir de futur Waffen-SS (à partir de 1939) ou l’élite du Reich allemand. Les sélections pour rentrer dans ces nouvelles écoles sont très strictes : des jeunes adolescents à fort potentiel sont d’abord sélectionnés parmi les « Hitlerjugend », puis une série de tests leur sont imposés. Finalement, seuls les meilleurs des meilleurs ont l’honneur d’intégrer les Napolas. Les étudiants y sont formés -à travers la vision du parti nazi- à l’art de la politique et de la guerre ; ils sont soumis à un entrainement physique intense mettant l’accent sur le dépassement de soi et la compétition. Ainsi, chaque étudiant doit  prouver son courage et sa détermination; mais les conditions sont extrêmes et les blessés ou les morts n’y sont pas rares. Ainsi la hantise de l’échec pousse chaque jeune homme à affronter les épreuves avec toujours plus de fanatisme par peur de passer pour le maillon faible.

L’embrigadement de la jeunesse étendu à toute l’Europe occupé

Avec le début de la guerre, l’embrigadement de la jeunesse prend une très grande importance pour exporter ou imposer les idées du « national-socialisme » au restant de l’Europe. Des organismes d’encadrement de la jeunesse existent alors déjà en 1939 dans d’autre nations totalitaires européennes comme en URSS ou dans l’Italie fasciste de Mussolini.

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Jeunes garçons de « opera nazional balilla »

Mais, avec son expansion militaire, l’Allemagne impose dans les pays vaincus un même système d’embrigadement de la jeunesse. Un des cas notables reste la France de Vichy où fleurissent rapidement des dizaines d’organisations patriotes d’encadrement de la jeunesse. Toutefois, les valeurs enseignées divergent par rapport aux associations allemandes. En effet, on apprend plutôt aux jeunes âgés de vingt ans, les valeurs de travail, d’obéissance, de patrie, d’amour et de confiance totale envers le Maréchal Pétain. C’est ainsi que naissent les « chantiers de jeunesse » dont l’objectif est double. Tout d’abord mettre en avant les valeurs de la Révolution Nationale pensées par Pétain et faire accomplir différentes missions civiques, militaires et d’intérêt général aux jeunes dans la zone sud ou en Afrique du nord. Dans la zone nord, la jeunesse est employée par la force occupante au « service du travail obligatoire » dans les usines allemandes.

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Affiche de propagande pour les chantiers de jeunesses

 

Le sacrifice inutile des jeunes allemands dans la fin de la guerre

Les Jeunesse Hitlériennes continuèrent à fonctionner pendant toute la Seconde Guerre Mondiale approvisionnant l’armée jusqu’en 1945, année à partir de laquelle le Reich allemand se bat sur son territoire. C’est pendant la bataille de Berlin que pour la première fois les Nazis utilisent les jeunes enfants pour défendre les ruines de la ville. C’est dans un dernier élan de folie, avant son propre suicide, qu’Hitler sacrifie des centaines de jeunes enfants fanatisés dans la défense de la capitale allemande.

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Enfant lors de la bataille de Berlin
Après la guerre, la fin de l’embrigadement de la jeunesse en Allemagne ?

La fin de la guerre marque la chute du Nazisme, mais l’Allemagne est désormais scindée en deux. A l’Ouest, les alliés finissent par installer un gouvernement démocratique : « La République Fédérale Allemande » et à l’Est, l’Union Soviétique installe un gouvernement idéologiquement proche, « la République démocratique Allemande ». C’est ainsi que l’embrigadement de la jeunesse continua en Europe de l’Est jusqu’à la chute de l’URSS en 1991.

4 réflexions sur « La jeunesse sacrifiée du « National-socialisme » »

  1. Bon texte, Cédric, merci!
    Ce qui me fascine toujours quand je retravaille sur l´histoire des Scholl et de leurs amis de la Weiße Rose, c´est que le père Scholl avait, contre ses propres idées profondément anti-nazie, laissé ses enfants entrer dans la Hitler Jugend- pour Hans- et le Bund Deutscher Mädchen- pour Sophie-, pour ne pas les contrarier dans leur voeu de faire « comme tout le monde », mouvement assez naturel chez un ado. Mais cet enrôlement ne les a pas empêchés de se forger un esprit critique, de se sortir de la voie toute tracée et de devenir les virulents résistants contre les Nazis que l´on connait. Ce qui, tout comme le livre dont parle Jasmine, prouve bien que la propagande, l´enrôlement, la manipulation systématique des esprits ne tuent pas tous les bons germes et que certaines grandes âmes trouvent tout de même le courage et la force, comme des gens de la trempe du papa de notre amie A. Dufy, de s´extraire du lot et de se battre contre des idéologies mortifères.

  2. Bravo Cédric de ton jeune âge tu as fait une belle analyse c’est bien.
    Mon papa a fait les chantiers de jeunesse à Aix les Bains, avant de rentrer dans le maquis de BLANOT
    Ensuite la déportation… la formation qu’il a reçu aux chantiers de jeunesse l’a aidé lors de son internement.

  3. Bonjour Cédric,
    Bravo pour ton article et l’analyse (et également pour les autres articles).
    Moi qui ai grandi avec deux « Républiques Allemandes », j’ai souvent entendu cette phrase :
    « Es war nicht alles schlecht » (Pas tout était mauvais). Cette phrase me choque toujours car elle est entièrement fausse.
    Tes copains et toi, vous avez la possibilité, voire le devoir de vous forger une propre opinion.
    Il y a beaucoup de mouvements xénophobes en ce moment, mais je sais que la grande majorité des jeunes (et je compte sur vous) est immunisée contre ces tendances. Je vous souhaite une bonne continuation et un grand public qui suit le blog.
    (Et Bon Noël, bien entendu) Jürgen

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