1956 : la crise du canal de Suez

Le Caire, 9 Novembre 1956

Cher Paul,


Comment allez-vous, toi et Anne ? Vos enfants Sarah et Henri doivent être grands maintenant… Je t’écris du Caire d’où nous allons bientôt partir ma femme et moi.
Nous devions rentrer en France le premier du mois, mais nous n’avons pas pu.

Es tu au courant ? Les médias égyptiens disent que la crise a commencé le vingt-neuf octobre, suite à la nationalisation du canal par l’Égypte le vingt-six juillet. Mais je peux te dire que nous sentions une grande tension quelques jours auparavant… Le premier ministre britannique Anthony Eden, le premier ministre israélien David Ben Gourian et notre président du conseil Guy Mollet ont comploté contre le peuple égyptien dont Nasser est le dirigeant.

Ici, au Caire, on avait entendu quelques rumeurs mais rien de sérieux.  Le vingt-neuf octobre, suite aux accords, Israël a envahi le canal, rapidement suivi par les Anglais et les Français à partir du trente-et-un. Plus de 254 000 combattants de notre côté et 70 000 pour l’ennemi égyptien. Tu imagines ? C’était perdu d’avance pour l’Égypte… Qu’en penses-tu ?

Le « cessez-le-feu » était il y a deux jours. Les Égyptiens ont été battus militairement comme je l’avais prédit, mais du point de vue diplomatique, les conséquences sont catastrophiques. En échange de concessions économiques, on a été obligé de battre en retraite sous la pression des Soviétiques et même des Américains. Fanny pense que la crise sera principalement retenue pour « les leçons » qu’elle apporte sur le nouvel équilibre des forces pendant la Guerre Froide que nous sommes en train de vivre.

Je pense qu’il a raison. J’espère que ce conflit s’arrêtera un jour… Réponds moi vite !

Toutes mes amitiés

Francis 

Le point d’histoire : en juillet 1956, Nasser décide de nationaliser la principale ressource d’Egypte pour pouvoir développer économiquement son pays : le canal de Suez, contrôlé normalement par les Français et les Britanniques, qui appliquent un droit de passage pour tous les bateaux qui y passent, en reversant très peu aux Egyptiens. Les Français et les Britanniques, mécontents, décident de reprendre le canal par la force et lancent une offensive brutale, qui leur permet de reprendre le contrôle. Mais sur le plan diplomatique, ce geste est catastrophique et les Etats-Unis forcent les troupes françaises et britanniques à se retirer, accentuant la position de Nassser, qui ressort grandi de cette crise.

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